Je jetai un coup d’œil à ma sœur qui dormait paisiblement, ses cheveux roses encadrant son visage. La voir comme ça si calme, me donnait l’impression qu’en fait, la vie était belle, que tout allait bien, mais sa main crispée retenant la mienne me ramenait vite à réalité. Même lorsqu’elle dormait, ma sœur me protégeait du monde et de ce qu’il était devenu.

Je me plaçais sur le dos et je me rappelai cette journée qui avait tout changé. Je m’étais encore levée en retard, j’avais dû laisser tomber le petit déjeuner et je m’étais habillée en quatrième vitesse. Je me souviens aussi que j’étais presque tombée dans les escaliers en tentant d’attacher mes cheveux. C’était tellement normal. Les parents n’étaient pas là, mais ce n’était pas nouveau. Je devais avoir interro d’anglais et j’étais si nerveuse que je n’avais pas vraiment porté attention à ce qui m’entourait.

En classe finalement, l’évidence m’avait sauté aux yeux, les visages paniqués des autres élèves aussi. Les adultes avaient disparu, comme par magie. D’un coup pouf. Je n’avais pas eu le temps de m’inquiéter, ma sœur me rejoignait déjà et me tirait plus loin. Nous avons passé plusieurs jours à chercher dans la ville pour les adultes, pour nos parents, pour des indices à la limite. Le plus bizarre, c’était l’espèce de brouillard qui entourait la ville et qui nous ramenait toujours au même point, comme si on tournait en rond indéfiniment. Je n’aimais pas ça, mais je ne paniquais pas.

Je dois avouer que j’avais de la chance d’avoir ma sœur. Sans elle, je n’aurais pas pu garder mon sang-froid, je n’aurais pas pu continuer d’avancer. Pendant encore plus qu’un mois, nous avons continué de chercher et nous avons tenté de survivre, mais la ville devenait de plus en plus dangereuse avec les groupes extrémistes et violents qui se formaient. Nous avons décidé de rejoindre les United Heroes, parce que les autres clans nous semblaient un peu trop intenses.

Encore une fois, nous avons travaillé, mais pour la survit du groupe entier. Être entourés nous a fait du bien. Nous avons pu reprendre un peu de notre joie naturelle et la tension s’est adoucie. Bien évidemment, cela n’allait pas rester, vous avez cru à une belle fin heureuse ? Tant pis.

C’est pendant la nuit, qu’ils ont décidé d’attaquer. Nous étions l’un des sous-groupes les plus éloignés du camp, mais nous avions des gardes en conséquence avec nous. J’imaginais le pire pour ces garçons et filles de mon âge qui devaient nous protéger au péril de leur vie. Il y avait plein de bruit, de cris, on avait coupé l’électricité, je cherchais ma sœur autour de moi, mais j’étais aveuglé par les lumières qui explosaient au plafond. C’est elle qui m’a rejoint et encore une fois, c’est elle qui m’a permis de survivre. On ne savait pas quoi faire, s’enfuir, combattre, se cacher ? Nous avons opté pour la dernière solution et nous avons trouvé une armoire. Au début je trouvais l’idée idiote, c’était trop logique, mais finalement ça a marché. Personne n’est venu ouvrir la porte. Après un long moment, quand tout était silencieux, ma sœur a voulu ouvrir la porte, elle pensait que c’était fini alors elle a osé s’avancer vers la porte. Son pied a frappé quelque chose, il y a eu un bruit et on a entendu des voix, elle a vite reculé au fond de l’armoire pour me dire de rester calme, qu’elle revenait, que tout allait bien. Je n’étais pas si idiote, je me doutais de son plan, j’ai tenté de la retenir, mais elle a bondi à l’extérieur en criant sans que ma main n’atteigne son bras. Finalement, j’ai entendu un bruit sec, ma sœur avait arrêté de crier.

Je suis restée encore un peu dans l’armoire, mais je suis sortie. S’ils avaient pris ma sœur, je ne pouvais pas perdre le groupe de vue. Je les ai suivis pendant un long moment. Même si je n’étais pas spécialement la plus intelligente, j’étais surement celle qui savait le plus se fondre dans le décor. Ma sœur avait les bras, le caractère et la logique. J’avais le cœur, la discrétion et la malice. Je me doutais que Reina ne voulait pas que je vienne, mais il m’était impossible de l’abandonner. Pour cette fois, il fallait que ce soit moi la plus forte. J’ai donc réussi à m’infiltrer jusqu’au camp, mais arrivé là, comme je ne connaissais pas du tout la géographie des lieux, j’étais complètement perdue. Et si j’entrais dans le bâtiment et que je ne trouvais pas de cachette ? Je ralentis le pas et analysa la situation. Il y avait beaucoup de personnes, beaucoup trop, mais ils ne pouvaient quand même pas tous se connaitre ? Je devais jouer la carte de l’incognito.

Je me glissais dans la foule et disparue parmi ses membres. J’étais vêtue de couleur un peu trop claire pour l’ambiance générale, mais je n’avais pas trop l’impression de créer des réactions bizarres, on ne me regardait que très peu, sauf peut-être deux garçons qui glissèrent les yeux vers mes jambes avec un regard intense, comme s’ils avaient faim. Je fis comme si c’était normal et continuai ma route vers le bâtiment où j’avais vu ma sœur disparaitre avec une dizaine d’autres prisonniers. Presque toutes des jolies filles. C’était très louche en fait, même si je ne m’en rendais pas compte à ce moment-là.

Je suis simplement entrée par la porte principale, comme si j’avais réellement quelque chose à faire là. Le problème fut les gardes devant une porte. Le positif, c’était que je savais où trouver ma sœur, le négatif c’est que je ne savais pas comment entrer et la délivrer. Je décidais donc d’attendre un peu et de me trouver une autre cachette. Je reculais doucement dans le couloir et quand je me retournai, je fonçai dans quelque chose de mou qui n’était pas là auparavant. Levant les yeux, je croisai un regard profond que je n’oublierai jamais. Le garçon inconnu vit dans mon hésitation une réponse à sa question muette. Non en effet, je n’avais pas du tout d’affaire là. Il me poussa vers l’intérieur et me fit entrer dans la pièce avec un simple signe de tête au garde. Il faisait de la télépathie ou quoi ces mecs ?

À l’intérieur, je reconnus plusieurs visages, mais un seul m’attira tout de suite. Ma sœur me cria dessus, mais je ne l’écoutais pas. J’étais vraiment heureuse de la voir vivante et en bonne santé. Elle ne me regarda pas longtemps, elle provoqua plutôt celui qui m’avait amené. Je dois avouer que cette fameuse journée était encore floue dans ma tête. Je me souviens que le chef des New Exuviae était venu, que ma sœur lui avait demandé qu’on travaille pour lui et qu’il avait accepté.

Je poussai un long soupir, les yeux toujours vers le plafond, même si les images dans ma tête étaient toutes autres. La respiration calme de ma sœur me rassurait, mais je n’arrivais pas à dormir.

Nous avons finalement été engagées, mais ça n’avait pas été facile de faire ce qu’on nous demandait. Kidnappé des gens n'était pas quelque chose d'agréable, mais nous avions cet instinct de survit qui nous donner le courage de continuer. Après une ou deux semaines, nous avons finalement été transférée de groupe et affectées à notre poste actuel : informatrices chez les Haiiro no Kitsune.